Exclusif, interview de François Feuillet : «Le camping-car est le loisirs le moins polluant»
François Feuillet, président du Syndicat des Véhicules de Loisirs, Président d’honneur du groupe Trigano, a accepté de nous accorder un peu de son temps pour faire un point sur le secteur des véhicules de loisirs. Entretien, 1ère partie.
Esprit Camping-Car : M. Feuillet, comment se porte, aujourd’hui, le marché du camping-car ?
François Feuillet : Nous sommes actuellement dans une période et un fonctionnement atypique. Il y a énormément de commandes qui sont passées chez les distributeurs, cela sur l’ensemble des pays européens. C’est bien plus que ce qui avait été anticipé. On constate l’arrivée de beaucoup de nouveaux clients qui n’ont pas de camping-cars à reprendre. Ce qui, malheureusement, provoque par ailleurs une pénurie des véhicules d’occasion. Ces clients se jettent sur le camping-car de façon, parfois, désordonnées.
La raison ? Clairement parce que le camping-car est une bulle sanitaire mobile qui permet aux couples de continuer à survivre en faisant, bien entendu, attention au respect de toutes les mesures nécessaires pour la survie. Mais surtout, ils vivent, car il ne reste pas chez eux, ils partent avec leur lit, leurs drap, douche, assiette… Ils partent de chez eux et n’ont donc pas à fréquenter ces lieux de perditions où ils risquent leur vie comme les restaurants, les trains, les hôtels, les voitures, les avions, etc…
ECC : Est-ce un moyen de continuer à vivre avec la liberté qu’on désire toutes et tous ?
F.F : On pourrait vivre de la même façon en restant chez soi. Mais chez soi, c’est toujours la même chose, ça devient vite monotone car on ne peut pas faire des choses qu’on aimerait faire, comme visiter des lieux, sortir, prendre l’air. Quand on constate que pour les vacances de la Toussaint, il est annoncé une baisse de 75% des voyages à l’étranger et 60% des voyages en France, cela veut dire que les gens ont peur. Le camping-car permet de vaincre cette peur et de continuer à vivre pratiquement normalement.
En camping-car, on peut gérer son environnement, notamment le nombre de personnes qu’on peut côtoyer en fonction des directives gouvernementales. Si le gouvernement recommande de ne pas avoir de contacts avec plus de 3 personnes extérieures à votre foyer, en camping-car, c’est possible. Bien entendu, il existe toujours des contacts «obligatoires» comme lorsque vous prenez de l’essence ou faites quelques courses. Mais le reste, ce n’est que du contact utile. Quand on reste chez toi, notamment en zone urbaine, les contacts sont multipliés dès qu’on sort de son domicile.
Cet «atout sanitaire» vient s’ajouter aux atouts fondamentaux que nous connaissons, à savoir la liberté, on part quand on veut où on veut, l’économie car on ne dépense pas plus qu’à la maison et, bien sûr, le respect de l’environnement. Le camping-car est le loisir le moins polluant pour l’environnement, le plus respectueux de la nature par rapport à tous les autres modes de loisirs.
En 2008, il se vendait plus de camping-cars en France qu’en Allemagne
ECC : Selon vous, est-ce que ce marché du camping-car, fourgon et van aménagé peut encore grandir en France ?
F.F : En France, je ne sais pas, peut-être. La France est un pays qui est relativement peu favorable aux camping-cars. En 2008, il se vendait plus de camping-cars en France qu’en Allemagne. Aujourd’hui, il se vend plus du double de camping-cars en Allemagne que chez nous. Entre 2008 et aujourd’hui, le marché du camping-car n’a pas suivi l’évolution qu’il aurait du suivre, comme en Allemagne.
En France, le camping-car est un achat discrétionnaire. On peut acheter ou pas un camping-car, ça ne change pas grand chose à sa vie. On peut s’en passer donc, cet achat, on peut le supprimer. On le supprime si on a peur ou si on manque de confiance. Or, les Français n’ont aucune confiance, aucune confiance dans leur économie, dans les hommes politiques, dans leurs institutions. Ils n’ont confiance en rien. Les récents sondages sur la COVID-19 montrent qu’ils n’ont même confiance envers le gouvernement pour résoudre correctement ce problème.
Parallèlement, les Allemands ont une confiance absolue en leur gouvernement, en leur économie, en l’industrie. Cette confiance fait qu’ils dépensent alors que les Français, eux, préfèrent épargner plutôt que de dépenser. C’est d’ailleurs pour ça que le Français est beaucoup plus riche que l’Allemand. C’est paradoxal mais le Français ne dépense pas. Il épargne. C’est une épargne de précaution, intergénérationnelle et solidaire. L’Allemand emprunte et dépense.
ECC : Esprit Camping-Car est arrivé sur le marché il y a 13 ans. Pour vous, quelles sont les évolutions majeures du marché, des véhicules ?
F.F : Plusieurs points. Tout d’abord, l’émergence du van, ensuite, la quasi disparition de la capucine. Le camping-car est devenu très moderne au niveau du style, de la décoration intérieure par rapport à ce qu’on voyait avant. Cela a évolué. Par exemple, avant nous avions des portes en bois. C’est fini tout ça. Les couleurs changent. Le style devient plus automobile. Ça fait moins chalet suisse mais plus voiture.
Des évolutions ont été très importantes depuis plus de 30 ans
ECC : Depuis 39 ans que vous êtes un acteur majeur du marché, ressentez-vous une fierté d’avoir pu contribuer à toutes ces évolutions du marché ?
F.F : Oui et non. Nous avons fait ce que nous devions faire pour offrir une réponse aux clients qui cherchaient des solutions françaises plutôt que des solutions uniquement allemande. Le métier s’est considérablement professionnalisé. Au début, c’était un bricolage complet avec de nombreux petits constructeurs issus de la caravane dans certains cas ou qui tâtonnaient ou disparus depuis. Il y avait des distributeurs qui ne savaient pas vendre des produits nouveaux, des concessions qui ressemblaient plus à des champs de betterave.
Depuis, ça a bien changé, tout s’est professionnalisé. Le crédit à la consommation a repéré cette niche intéressante de personnes représentant, au final, peu de risque en raison de leur revenu fixe lié à leur retraite. Avec de très bonnes garanties sur le client et le produit, les crédits se sont développés avec des taux bon marché et relativement longs qui ont aidé à l’expansion du marché. Les évolutions ont été importantes, c’est certain.
Suite de l’entretien de M. Feuillet sur notre site. Vous pouvez retrouver l’intégralité de cette interview dans le numéro 100 d’Esprit Camping-Car.
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