Interview, Laurent Morice, Camping-Car Park : « Rendre possible le stationnement dans les plus beaux lieux touristiques »
Créé par Laurent Morice et Corinne Bruel il y a dix ans, Camping-Car Park connaît une forte croissance. Souvent critiqué, l’entreprise tient à mettre les choses au clair et se confie à Esprit Camping-Car sans langue de bois. Entretien avec Laurent Morice et Olivier Coudrette, le directeur général.
Esprit Camping-Car : Pouvez-vous expliquer la philosophie et les objectifs de Camping-Car Park ?
Camping-Car Park : A notre création, l’idée majeure était de rendre possible l’hébergement des camping-caristes dans les endroits touristiques au plus près des centres d’intérêts essentiels, le tout en leur offrant une solution de confort répondant à leurs attentes. Ces attentes là, nous ne les avons pas inventé parce que nous avons fait notre propre sondage auprès de presque 600 couples de camping-caristes et auprès de nombreux élus des villes touristiques.
ECC : Du coup, quel est votre rôle ?
CCP : Notre rôle est de rendre possible le stationnement des camping-cars dans les plus beaux lieux touristiques de France en veillant à ce que la trace laissée par les camping-caristes ne puisse être qu’économique et culturelle. L’objectif 1 est de veiller à ce qu’aucune trace de pollution visuelle ou physiologique ne puisse être reprochée aux camping-caristes. Nous sommes convaincus que si cette activité devait continuer à ne pas respecter les codes sociétaux que sont les nôtres aujourd’hui, demain, nous serions bannis de tous les endroits qui nous intéressent. Nous voulons tout mettre en œuvre pour que le camping-carisme continue de se développer dans les 20 ans à venir. Pour nous, le côté nomadisme du camping-car nécessite des lieux d’accueil dédiés aux camping-cars avec des conditions d’accueil digne du 21ème siècle.
«Aucune commune gérée par Camping-Car Park n’a été attaquée en justice par le CLC»
ECC : Sur notre groupe Facebook de 8700 membres, je dois vous avouer que vous ne faites pas l’unanimité auprès de nos membres qui commentent de façon parfois négatives sur l’impact de Camping-Car Park. Comment pouvez-vous répondre aux critiques de ces camping-caristes, notamment sur le prix de vos aires ou souvent que lorsque vous vous installez dans une commune, les anciennes solutions disparaissent ?
CCP : C’est très intéressant comme remarques. Sur le fond, il est évident que lorsqu’une collectivité territoriale décide de structurer l’accueil des camping-caristes et qu’elle fait appel à une structure privée pour les aider (ou aussi qu’elle décide de gérer elle-même, la majorité des aires payantes en France est gérée en régie), de plus en plus souvent, ces communes mettent en parallèle une interdiction de stationnement plus ou moins légale, et surtout ils adossent la structuration de l’offre touristique à une réglementation propre à la commune et, très majoritairement quand ils le font eux-mêmes en régie.
ECC : Pouvez-vous étayer vos propos sur ce point ?
CCP : Bien entendu. J’en veux pour preuve que sur tous les procès remportés par le CLC à propos d’arrêtés municipaux de stationnement illégaux, aucune ville où une aire est gérée par Camping-Car Park n’est concernée. Tous les procès qui ont eu lieu concernent une ville où la gestion d’une aire de stationnement payante est faite en régie. Je tiens à le rappeler car l’interdiction de stationnement dans une commune n’a aucun lien de causalité avec notre travail. Bien au contraire. A ce jour, aucune commune dont on gère l’aire de stationnement n’a eu à faire au CLC. Le CLC n’est pas fou, il sait que ces communes reçoivent nos conseils. Nous tenons à ce que ces aires soient toujours bien faites, et surtout respectueuses de la législation française. Nous sommes très tranquilles sur ce sujet.
ECC : Mais comprenez-vous toutefois qu’il puisse y avoir des critiques des utilisateurs, notamment sur les prix de vos aires ?
CCP : Bien sûr que je les comprends. Le marché de l’hébergement du camping-car va de la gratuité à environ 50€ la nuit, dans les camping. Nous sommes camping-caristes et passons deux à trois mois en déplacement en camping-car. Nous faisons parfois de la gratuité ou sur nos réseaux ou dans des campings. Nous sommes éclectiques et nous connaissons les prix. Mais chaque soir, nous partageons toujours le verre de l’amitié avec les camping-caristes présents sur l’aire et avec les élus, quand nous sommes sur une aire CCP. On entend plein de choses.
Mais entre la gratuité et les 50€ dans un camping, il y a un curseur à positionner en fonction de ces prix. Bien sûr, face à la gratuité, notre réseau est cher car notre prix moyen se situe aux alentours de 12€ par nuit avec tous les services inclus. Nous estimons que nous sommes une solution d’hébergement qui est au juste prix. Nous veillons à ne pas changer cela car nous voulons une aire juste au rapport qualité-prix juste et raisonnable comme l’espère 63% des camping-caristes.
Mais quand on cherche la gratuité, forcément, on est frontal avec Camping-Car Park. C’est l’éternel débat de notre société : sommes-nous des «consom’acteurs» ou des consommateurs des années 60 où on pouvait imaginer une société où tout était gratuit et payé par les autres. On sait tous aujourd’hui que cette position n’est plus tenable. Cela pousse les élus à refuser cette clientèle. Moi, je veux que les élus nous apprécie. Nous sommes des voyageurs touristiques.
«Nous estimons nous situer à un juste prix sur nos aires»
ECC : Ce qui est certain, c’est que votre présence fait débat au sein des camping-caristes et des acteurs du marché ?
CCP : Oui, c’est vrai et ce n’est pas pour me déplaire. Par contre, aucune presse, aucune association de défense des camping-caristes, aucun acteur du marché, ne s’offusque de voir que nous sommes la seule activité touristique à subir une injustice fiscale à deux titres.
ECC : C’est-à-dire ?
CCP : La première au titre de la TVA. 20 points de TVA alors que tous les autres modes d’hébergement sont à 10%. Personne n’en parle. Et le fait de payer une taxe de séjour d’un camping 5 étoiles alors que les services sont ceux d’un parking à service. Bizarrement, personne n’en parle. Nous allons faire en sorte que ce sujet revienne dans le débat car ce n’est pas normal, pas équitable.
ECC : Vous êtes en pleine croissance à l’heure actuelle. Depuis votre arrivée sur le marché il y a 10 ans, est-ce que des communes reviennent sur leur engagement et vous dise ne plus avoir besoin de vous ?
CCP : Quasiment pas, nous sommes quasiment à 100% de taux de renouvellement des contrats. Pour l’immense majorité des élus, cette problématique n’existe pas dans leur tête. Ils veulent accueillir correctement les camping-caristes, dans les règles de l’art, le tout sans générer de déficit public supplémentaire. Quand l’élu fait appel au privé, à 98%, c’est Camping-car Park. De temps à autre, c’est à un industriel qui essaie de nous copier. Mais il faut de la concurrence.
Généralement, quand les élus découvrent l’accompagnement qu’on leur propose, ils ne sont pas fous. Ils voient bien que 365 jours par an, s’ils ont besoin d’une intervention, d’un conseil, quelque soit la langue, ils l’ont. Nous sommes disponibles et peu cher. A l’échelle d’une ville, nous transformons régulièrement un déficit public d’une dizaine de milliers d’Euros par un profit en terme de recettes pour la ville d’une dizaine de milliers d’Euros. Beaucoup d’élus ont compris que les camping-caristes sont une source d’économie touristique pour peu que cela soit bien géré.
ECC : Que demandez-vous aux élus quand vous installez une aire de stationnement dans leur commune ?
CCP : Il faut savoir que nous ne sommes pas propriétaires de ces aires. Mais en échange, nous demandons à ces élus de nous trouver le terrain le plus adapté à l’usage du camping-carisme, à savoir moins de 500 mètres d’un centre d’intérêt, d’un centre ville, d’une cote, d’une remontée mécanique. Fatalement, les aires que nous gérons sont bien positionnées pour répondre aux attentes des camping-caristes.
«Les communes font appel à nos services car nous leur apportons la simplicité et les résultats»
ECC : Quel est le coût d’un investissement pour une commune de faire appel à vos services ? Combien ça lui coûte par an et combien ça lui rapporte ?
CCP (Olivier Coudrette) : Ce qui coûte le plus cher dans l’aménagement d’une aire, c’est l’arrivée des réseaux et du foncier. Par exemple, sur une aire proche du Mans, cette aire là, son coût à l’emplacement était de 7.000€. Sur certaines communes, ce coût n’est que de 500€ l’emplacement. C’est dur de donner un prix car tout dépend de la manière dont la commune va vouloir accueillir les usagers. Plusieurs communes ont testé Camping-Car Park tout en gérant d’autres aires sur leur territoire en même temps. Quand elles font le bilan, 5 ans plus tard, elles se rendent compte que notre aire génère 2,4 fois plus de fréquentation, même si elle est moins bien située. Du coup, elles nous confient leur gestion. C’est factuel.
ECC : Que vous disent les communes quand elles font appel à vos services ?
CCP Olivier : Souvent, quand elles nous contactent, elles nous disent en avoir ras-le-bol des camping-cars. Elles veulent juste des bonnes recettes pour bien gérer le passage des camping-caristes. C’est ce que nous faisons car on leur apporte de la simplicité et des solutions efficaces. On apporte aussi de la communication car on créé des circuits touristiques, des bons plans. On met en avant les acteurs économiques locaux en mettant en place des partenariats avec ces acteurs. L’idée est de faire rester les camping-caristes sur place. Nos circuits touristiques sont prisés, notamment celui sur les Châteaux de la Loire. Notre application a été téléchargée 200.000 fois. Les utilisateurs adorent et remplacent même les cartes routières par l’application car ils ont tout en un clin d’oeil, y compris les disponibilités des aires en temps réel.
ECC : Combien avez-vous d’utilisateurs ?
CCP Olivier : Nous avons 425.000 utilisateurs de Camping-Car Park et nous venons de dépasser les 2 millions de nuits en juin dernier.
ECC : Pour une commune accueillante, combien redistribuez-vous financièrement parlant ?
CCP Olivier : Nous le communiquons aisément. Les deux tiers du chiffre d’affaire reviennent aux communes quand la commune investi dans le foncier et les travaux. Par contre, cela nous arrive parfois d’investir dans les équipements, fatalement, le rapport est différent et on agit au cas par cas.
ECC : Vous souhaitiez réagir aux propos de M. François Feuillet parus dans nos colonnes lors de notre dernier numéro. Quelles précisions souhaitez-vous apporter ?
CCP : A la lecture de cette interview, j’étais offusqué et navré de voir qu’un homme qui a un tel parcours, une telle réussite professionnelle, puisse dire autant de propos non factuels et incohérents avec la société dans laquelle nous vivons. Sa réussite est exceptionnelle mais c’est un industriel. Si vous me demandez de gérer une industrie, préparez-vous à des dégâts. Ce n’est pas mon rôle. Mais nous, notre rôle, c’est le tourisme et l’aménagement du territoire.
Ce n’est pas de fabriquer ni de vendre. De voir un industriel parler ainsi, j’en suis offusqué. Si M. Feuillet avait interrogé ses réseaux de distribution, il saurait que dans les deux premières questions posées par un primo-accédant, la question de l’hébergement en fait partie. Il sait quel est son meilleur atout. Il nous connaît. Il était la deuxième personne à être informée de la création de Camping-Car Park en 2011. Il sait qui nous sommes et connaît nos valeurs.
«Je suis navré des propos de M. Feuillet car s’il existe bien un acteur qui dessert positivement les constructeurs et les distributeurs, c’est Camping-Car Park»
ECC : Concrètement, que lui reprochez-vous dans ses propos ?
CCP : Contrairement à ses propos dans votre magazine, je prends un virage à 180°. Je pense que s’il y a un acteur qui dessert bien les constructeurs et les distributeurs de camping-cars, c’est Camping-Car Park. Car plus les solutions de stationnement et d’hébergement seront simples, efficaces et ne poseront pas de problèmes aux territoires, mieux ce sera fait et plus il y aura d’adeptes du camping-car. A l’inverse, plus il y aura des interdictions, des PV, plus on enverra les camping-caristes stationner auprès de la déchetterie loin du centre-ville, plus ça fera fuir les usagers. Dans ses modes de réaction, ce secteur d’activité n’a pas évolué. Mais ça va changer très vite. Vous allez voir.
ECC : Qu’entendez-vous par là ?
CCP : En dix ans, on nous a confié la gestion de 200 aires. Cette année, en un an, on va en faire entre 80 et 100 nouvelles. Le débat n’existera plus. On court après les demandes tellement nous en avons. De constater qu’un tel industriel puisse autant se tromper sur nous, ça me fait mal au cœur. J’ai envie de lui dire de rester à la gestion de ses usines. Une action Trigano a beaucoup plus de valeur qu’une action Camping-Car Park. Il est très bon dans son métier, c’est indéniable.
Mais il ne prend pas la dimension du débat d’aujourd’hui. Le vrai débat auquel nous devons nous attaquer et être tous unis en France et en Europe, c’est l’avenir du camping-car et du camping-carisme dans la société nouvelle respectueuse de l’environnement. Il va falloir prendre en compte toutes les interdictions qui vont avoir lieu, comme dans de nombreuses grandes villes qui ne voudront plus de nous. Il y a un risque ça s’étende dans d’autres communes. Il y a un vrai risque que la fiscalité s’envole. Plutôt que de se désunir, nous devrions tous travailler de concert et adoucir les contraintes de demain. Nous devons apporter les réponses ensemble, et non les uns contre les autres.
ECC : Cette «communion» permettrait d’avoir les élus du côté du camping-cariste selon vous ?
CCP : Il ne faut jamais oublier que ce sont les élus qui ont la gestion du territoire et qui l’aménagent. Si nous sommes respectueux de ces élus, ils sont toujours plus enclins à nous mettre en avant auprès des députés. Ce sont les députés qui votent les textes de lois donc plus nous les respecterons, mieux ils nous traiteront dans les textes réglementaires et mieux la vie des camping-caristes sera radieuse. Plus nous les mettrons au tribunal, plus ils nous détesteront et plus ils continueront à maltraiter les camping-caristes dans les textes de loi votés par l’Assemblée Nationale. Il faut regarder de l’avant sinon nous irons dans le mur.
ECC : Pour finir, allez-vous développer votre modèle en Europe ?
CCP : Nos usagers étrangers nous permettent un développement hors de nos frontières. Nous allons avoir trois aires en Belgique et trois aires en Espagne à très court terme. Nous prévoyons une grosse croissance européenne pour les années à venir parce que notre modèle est assez unique en Europe. Nos meilleurs ambassadeurs sont nos clients.
Camping-Car Park en chiffres
- 57 salariés
- 200 destinations
- 425.000 utilisateurs
- 2.000.000 de nuits passées sur le réseau
- 50% des camping-caristes français sont utilisateurs
- Sur 10 euros payées par un camping-cariste : 2,77 euros de Taxes (TVA + Taxes de séjours), 4,82 euros pour la commune, 2,41 euros pour Camping-Car Park
Si Mr Laurent Morice était si soucieux du bien être et des attentes de l’ensemble des camping-caristes il aurait conçu ces aires avec de réel services à la carte et pas obliger de payer un stationnement alors que la majorité d’entre nous sont autonomes. Même si l’option à 5€ existe cela suppose tout de même d’adherer a son système moyennant le paiement d’une carte,et, pourquoi devoir payer des services si je ne souhaite que stationner….
Système à revoir….
Bonsoir. En fait c’est des parkings. Interdiction de sortir table et chaises. Confinés dans le cc. 1 expérience : PLUS JAMAIS. je préfère encore été loin de tout mais libre. Pas dans le cc de mon voisin ou l’entendre ronfler la nuit !!!
Hm. Nouvelle aire Camping-Car Park à Seyssel (01) à la place d’une aire communale gratuite avec borne artisanale. Avant les places pour les CC étaient le long du Rhône. Maintenant on nous demande de nous garer comme des sardines dans l’aire CCP. Les véhicules de + de 6m auront du mal à manœuvrer, tellement c’est étroit. Puis la station de vidange est à l’extérieur de l’aire et tellement mal foutu, qu’avec un véhicule de + de 6m, on dépasse sur la route quand on vidange.
Et le comble: La ou on pouvait se garer avant, il y’as une barrière d’hauteur qui est apparu, sans qu’il y’as un danger de hauteur plus loin sur la route (Au bout il y’as une plateforme de retournement, qui n’est plus accessible… Etrange…. ou pas.
J’ai écrit à la commune en janvier 2021 en demandant une copie du arrêté motivé de l’installation de la barrière, aucune réponse. Donc j’appelle au mois de mars. Réponse: La barrière c’est parce-que l’aire est payante maintenant!
Je ne suis pas contre payer un prix raisonnable pour une belle aire bien aménage, mais la c’est ridicule. Et parlons de publicité mensongère. La foto sur le site de CCP de l’aire montre les anciens emplacement le long du Rhône, et pas le nouvel aire qui se trouve quasiment en dessous d’un pont d’une départementale très fréquenté.
Toursime de qualité… Je pense pas.
Intéressant. Malheureusement, nous pratiquons le camping-car, celui qui bouge tous les deux jours maxi. Pas opposé à payer un service (encore faut-il qu’il existe), nous trouvons dommage que les tarifs ne soient pas différenciés hormis pour l’eau. De fait nous n’avons pas nécessairement besoin d’électricité pour une simple escale et pourtant nous sommes souvent obligés de « l’acheter ». C’est de la vente forcée (interdite par l’article L121-11 du code de la consommation) mais je suppose que la mise en place d’un payement différencié serait compliquée et que ceux qui ne consomment pas payent pour les autres afin de tenir un tarif « abordable » (ce qui me semble également répréhensible). Il faudrait des aires « de passage » d’un coté et des campings de l’autre. Mais pour que cela fonctionne, il faudrait surtout un changement de mentalité de certains usagers.